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Tour de France des vins: Bordeaux

Après une petite dizaine d’articles dans cette rubrique, il était tout de même temps que nous parlions de la première région viticole de France :Bordeaux !
Les époques et les modes défilent mais Bordeaux écrase toujours tout, tant par la quantité de bouteilles que par la réputation supposée des vins. C’est d’ailleurs marrant de constater l’inaltérable popularité des vins de Bordeaux, unique référence chez un tas de personnes… « Le reste c’est de la bibine et pi le Bourgogne c’est trop cher! » Ah bon ?

Plus sérieusement, c’est pas facile de faire un article sur cette galaxie bordelaise tant les choses à dire sont nombreuses…  et c’est d’autant moins aisé que rien n’y est vraiment noir ou blanc. L’excellence côtoie la médiocrité, la modernité et  la tradition se font face, et si les bons vins y sont légion cela ne peut occulter totalement les quelques abus (notamment tarifaires) que l’on constate malheureusement.

Mais avant d’alimenter modestement le débat, je vais faire mon prof (modestement toujours) avec la petite présentation habituelle :

La région est en tête de la production hexagonale pour les vins AOC (4 fois plus de bouteilles produites qu’en Bourgogne, par exemple). De part et d’autre de la Garonne on trouve 2 grandes zones de production aux caractéristiques assez différentes : les rives gauche et droite, plus le Sauternais.

  • La rive gauche

Elle se compose du Médoc (au nord de l’agglomération Bordelaise) et des Graves (au sud).  Le Médoc est historiquement la région la plus réputée et a d’ailleurs accouché du fameux classement des vins de Bordeaux, élaboré pour l’exposition universelle de Paris en 1855 et sensé ordonnancer de façon pyramidale les plus grands crus du coin. On y produit presque exclusivement des vins rouges, à dominante de Cabernet Sauvignon, cépage donnant des vins assez charpentés mais qui lorsqu’ils sont bien faits prennent une subtile profondeur, ne se dévoilant qu’au bout de quelques années.
Les Graves produisent des vins rouges (également à majorité de Cabernet Sauvignon) et des vins blancs secs.

  • La rive droite

Composée des vignobles de Saint-Emilion, Pomerol, Fronsac, de l’Entre-deux-Mers  et des côtes de Bordeaux (Côtes de Castillon, de Bourg, de Blaye…), on y produit surtout des vins rouges.
Cette région diffère de la rive gauche par la taille plus réduite des exploitations, par les sols et par la proportion des cépages utilisés dans les assemblages : ici le Merlot est roi, ce qui confère aux vins plus de rondeur et leur donne un côté plus immédiatement accessible.

Enfin, au Sud des Graves, on trouve la région de Sauternes-Barsac, royaume des raisins pourris pleins de sucre. L’appellation est totalement dédiée à la production des vins blancs liquoreux qui accompagnent avec bonheur nos foies gras et desserts de fête.

Parlons maintenant de ce qui énerve… en premier lieu, les tarifs !

Pour avoir un bon Bordeaux, faut généralement y mettre le prix. Certains diront qu’il en va de même pour la Bourgogne, certes… sauf qu’en Bourgogne le nombre de bouteilles produites est souvent tellement ridicule que les prix exorbitants ne sont que le malheureux résultat de la confrontation de l’offre et de la demande, eh oui… si les vins étaient beaucoup moins chers, la spéculation sur les marchés parallèles serait monumentale.  A Bordeaux, cette notion de rareté est bien moins présente.

Une des particularités locales est également l’instabilité des prix. Ils explosent de façon délirante dès lors qu’un millésime est annoncé comme étant très bon, et on oublie au passage de revenir aux tarifs d’origine lorsque l’année suivante, le vin n’est pas à la hauteur. Par ailleurs, les « millésimes du siècle », comme ils disent, semblent miraculeusement se multiplier ces temps-ci : 2005, 2009, et très probablement 2010… je veux bien croire que le microclimat fasse de Bordeaux une terre bénie des dieux, mais quand même !
Résultat : sur les trois dernières décennies, les grands vins de Bordeaux accusent une hausse des prix de près de 1000% (La revue du vin de France, Novembre 2010) ! Il y a encore quelques années, tout un chacun pouvait une fois de temps en temps s’offrir un Château Lafite pour une occasion. Aujourd’hui, à plus de 1000€ la bouteille, je préfère passer mon tour…
Les grands crus bordelais sont donc de plus en plus vus comme des produits de luxe réservés aux  « élites »  du monde entier, plus encore que les Champagnes. C’est la faute des Chinois dira-t-on pour se justifier, parait-il qu’ils boivent du vin maintenant…

Un autre reproche qui revient souvent est la façon même dont le vin est fait :

  • A la vigne, un usage parfois immodéré des pesticides et autres produits chimiques.
  • Dans le chai, un interventionnisme œnologique très poussé et l’usage de méthodes « modernes », qui parfois permettent de faire un meilleur vin, mais qui inévitablement gomment les spécificités du terroir et du millésime, ce que regrettent les défenseurs du classicisme, du naturel et de la tradition. Bordeaux est en effet en pointe dans la supposée « standardisation » du vin qui fait débat aujourd’hui.

Pour ces raisons, l’amateur de vin commence en général par aduler bordeaux, puis parfois s’en détourne pour souvent y revenir timidement. Cheminement classique, car il faut il faut bien avouer que peu de vins peuvent se comparer à un grand Bordeaux !

Enfin, ces vins présentent quand même l’avantage certain d’être facilement trouvables n’importe où : en grande distribution, qui il faut l’avouer est très bien positionnée niveau prix, chez les cavistes (plus rarement compétitifs), sur Internet…
Les « grands » Bordeaux demandent du temps pour se dévoiler.  N’hésitez donc pas à vous intéresser aux bons millésimes des années 70, 80, 90, souvent moins chers que les récents et que l’on peut encore trouver facilement dans les salles de vente, sur des enchères en ligne (voir l’excellent site idealwine.com), et même parfois (je dis bien parfois) sur ebay…

Bonne dégustation !

 

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